Par Ilyas El Omari
La propagation de la pandémie a entraîné une augmentation de l’utilisation d’Internet, plus particulièrement des plateformes des médias sociaux, ce qui a conduit les entreprises de télécommunications à doubler leurs bénéfices en raison de l’essor sans précédent de leurs activités, à un moment où d’autres activités économiques tombaient en récession, certaines se sont même immobilisées.
Tout le monde se souvient qu’avant l’éclosion de COVID-19, les sujets traités par les utilisateurs des plateformes des médias sociaux étaient dominés par la promotion des grandes marques, l’actualité beauté et mode, les innovations techniques et les potins de célébrités, éclipsant ainsi les sujets liés à l’environnement et la santé ainsi que les problèmes sociaux et culturels.
Aujourd’hui, il est flagrant que les discussions portant sur la mode et divers types de biens commerciaux se sont à leur tour éclipsées, car elles ont été fortement remplacées par des échanges portant plutôt sur les épidémies, la recherche médicale et les innovations scientifiques dans le but de faire face à la pandémie actuelle. Et ce, parallèlement à la prolifération des débats sur l’avenir de l’humanité, l’avenir des relations humaines et des droits de l’Homme en relation avec le droit avec la santé, l’environnement, l’accès au savoir et le libre échange d’informations.
Depuis la fin de 2010, un débat de grande envergure a eu lieu au sein du Conseil des droits de l’Homme des Nations Unies sur la liberté dans les plateformes numériques. À l’époque, la communauté internationale n’était pas parvenue à un consensus sur la réglementation de l’utilisation d’Internet par les particuliers, malgré l’opposition de certains pays et les réserves d’autres à ce sujet.
Par conséquent, la question la plus importante qui se posera après la sortie de la crise est la suivante: le contenu accentué sur l’aspect humain et social pendant la période de pandémie, comme mentionné dans les articles précédents, envahira-t-il les discussions sur les plateformes de médias sociaux à l’avenir, ou bien la tendance générale va être à nouveau dominée par le monde des affaires, en termes de prévalence des marques internationales, du commerce des armes et des pourparlers sur les guerres, au lieu de promouvoir les droits de l’Homme à une santé saine et à un environnement propre outre le droit des peuples à accéder à la science et à la technologie?
Il ne fait aucun doute que les êtres humains, et le monde dans son ensemble, devraient subir des transformations majeures après l’éradication de cette pandémie, comme l’ont souligné diverses études et sondages d’opinion. Une lutte effrénée va ainsi émerger pour savoir s’il faut conserver les mêmes espaces de liberté que la crise COVID-19 a ouverte sur le Web ou faut-il revenir aux mêmes règles du jeu dans tous les domaines, comme ce fut le cas avant la pandémie !
Un certain nombre d’études ont montré que, pour la première fois dans l’histoire de l’humanité, un seul mot a été utilisé plusieurs fois par jour par tous les gens à travers le monde, à savoir et bien évidemment «COVID-19», par rapport à la santé, l’environnement, le logement décent , etc.
Il est clair que l’attention s’est fortement concentrée sur le droit à la vie, qui est la pierre angulaire de la Déclaration universelle des droits de l’Homme, ainsi que sur tous les pactes et conventions dans ce cadre.
Cette utilisation intensive des plateformes de médias sociaux et d’autres espaces permettra-t-elle un libre débat sur le système des droits de l’Homme, en particulier le droit à la vie et les droits qui en découlent tels que le droit à la santé, un logement décent, l’éducation, la liberté d’expression, etc ? Incitera-t-elle la communauté internationale à reconnaître la puissance du monde virtuel et l’influence des internautes ? Obligera-t-elle la communauté internationale à aligner les législations internationales et nationales sur ces droits, ou continuera-t-elle de générer et de promouvoir la médiocrité et le non-sens, comme l’a clairement montré l’écrivain canadien Alain Deneault dans son livre “La médiocratie : la Politique de l’extrême centre”.
Nous serons ainsi voués, une fois de plus, à diffuser la culture de la consommation et l’acceptation des systèmes économiques, politiques et culturels qui perpétuent la médiocrité, la platitude et la vulgarité. Cependant, la réponse décisive à cette question sera connue sous peu, dans la période post-épidémique.
Ilyas El Omari, Président de ORF – Observer Research Foundation, Africa. Politicien et Activiste des droits de l’homme.